Scène 4
Eglé un instant seule,
Azor parait vis-à-vis d’elle
Eglé, continuant et se
tâtant le visage. Je ne me lasse point de moi. (Et puis, apercevant Azor, avec frayeur.) Qu’est-ce que c’est que cela,
une personne comme moi ?... N’approchez point (Azor étendant les bras d’admiration et souriant. Eglé continue.) La
personne rit, on dirait qu’elle m’admire. (Azor
fait un pas.) Attendez… ses regards sont pourtant bien doux… savez-vous
parler ?
Azor. Le plaisir de vous voir ma d’abord ôté la
parole ;
Eglé, gaiement. La
personne m’entend, me répond, et si agréablement !
Azor. Vous me ravissez.
Eglé. Tant mieux.
Azor. Vous m’enchantez.
Eglé. Vous me plaisez aussi.
Azor. Pourquoi donc me défendez-vous d’avancer ?
Eglé. Je ne vous le défends plus de bon cœur.
Azor. Je vais donc approcher.
Eglé. J’en ai bien envie. (Il avance.) Arrêtez un peu… que je suis émue !
Azor. J’obéi, car je suis à vous.
Eglé. Elle obéit ; venez donc tout à fait, afin d’être
à moi de plus près. (Il vient.) Ah !
La voilà, c’est vous, qu’elle est bien faite ! En vérité, vous êtes aussi
belle que moi.
Azor. Je meurs de
joie d’être auprès de vous, je me donne à vous, je ne sais pas ce que je sens,
je ne saurais le dire.
Eglé. Hé ! C’est tout comme moi.
Azor. Je suis heureux, je suis agité.
Eglé. Je soupire.
Azor. J’ai beau être auprès de vous, je ne vous vois pas
encore assez.
Eglé. C’est ma pensée, mais on ne peut pas se voir
davantage, car nous sommes là.
La dispute
Marivaux (1688-1763)
www.librio.net
Coût 2€uros
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