Inauguré en juin 1903, cet hôtel de 359 chambres (dont dix neuf sont offertes aux indigents) plus une suite "Françoise Sagan" fut revisité par les architectes en 1920 dans un style « Art déco ». Il est situé au cœur même de la ville dans un cadre reposant et magnifique bordé de jardins.
![](https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjU-8sng0ZX5nU-ML23uNtH-T60BBwRwKlWodFPJlGOcvBZq9SRC3Ud5foWWQZe33XbmHFTqxwn4kRce2QaNQm0MOv5mtQWlrKLOvp8DGDG0ZDAX5317tcoXigvK4peZBHSQjdhNWrv1yM/s1600/Arletty.jpg)
Notre salon Arletty: dès le début des années 1930, Arletty est devenue une figure érotique, ce dont témoigne ce portrait de Moïse Kisling, datant de 1933. Crédits : © Moïse Kisling / ADAGP, Paris 2012 / Photo © Studio Monique Bernaz, Genève.
mardi 31 décembre 2013
lundi 30 décembre 2013
Krapp jure. Débranche l’appareil, fait avancer la bande...
(Krapp jure. Débranche
l’appareil, fait avancer la bande, rebranche l’appareil)
- mon visage dans ses seins et ma main sur elle. Nous restions
là, couchés, sans remuer. Mais, sous nous, tout remuait, et nous remuait,
doucement, de haut en bas, et d’un côté à l’autre.
Pause.
Passé minuit. Jamais entendu pareil silence. La terre
pourrait être inhabitée.
Pause.
Ici je termine-
Krapp débranche l’appareil, ramène la
bande en arrière, rebranche l’appareil.
- le haut du lac, avec la barque, nagé près de la rive, puis
poussé la barque au large et laissé aller à la dérive. Elle était couchée sur
les planches du fond, les mains sous la tête et les yeux fermés.
Soleil flamboyant, un brin de brise, l’eau un peu clapoteuse
comme je l’aime. Jai remarqué une égratignure sur sa cuisse et lui ai demandé
comment elle se l’était faite. En cueillant des groseilles à maquereau,
m’a-t-elle répondu. J’ai dit encore que
ça semblait sans espoir et pas la peine de continuer et elle a fait oui sans
ouvrir les yeux. (Pause.) Je lui ai
demandé de me regarder et après quelques instants - (Pause)- après quelques instants elle l’a fait, mais les yeux comme
des fentes à cause du soleil. Je me suis penché sur elle pour qu’ils soient
dans l’ombre et ils se sont ouverts
(pause.) M’ont laissé entrer. (Pause.)
Nous dérivions parmi les roseaux et la barque s’est coincée. Comme ils se pliaient, avec un soupir,
devant la proue ! (pause.) Je me
suis coulé sur elle, mon visage dans ses seins et ma main sur elle. Nous
restions là, couchés, sans remuer. Mais, sous nous, tout remuait, doucement, de
haut en bas, et d’un côté à l’autre.
Pause.
Samuel Beckett (1906 - 1989)
Samuel Beckett (1906 - 1989)
« La dernière bande » Extrait
Aux éditions de minuit
lundi 23 décembre 2013
mercredi 11 décembre 2013
mardi 10 décembre 2013
lundi 9 décembre 2013
Savannah Bay
Madeleine. – Je
ne mourrai pas
(temps) tu le sais ?
Jeune femme (mouvement
de la tête, elle sait). - Oui
Madeleine. - Si moi
je mourrais, tout le monde mourrait, alors… ça n’existe pas…
Jeune femme. - C’est vrai.
Madeleine. - Ce ne
serait pas possible que tout le monde…
tout le monde…
Silence. Et puis égarement.
Jeune femme. - Non, ce ne serait pas possible
Madeleine. - Non
Temps.
Jeune femme (la
regarde, éperdue).-
Votre voix est devenue indécise, assourdie.
Madeleine.- ça arrive, ça arrive, je l’entends.
Jeune femme (douceur).-
Vous ne comprenez plus que très peu de ce qu’on vous dit.
Madeleine.- oui, très peu de ce qu’on dit. (Temps). Quelques fois rien.
Jeune femme (lent).-
vous êtes effrayante…
Madeleine.- effrayante…
Jeune femme.- Oui.
Madeleine.- Sans doute. Je n’ai plus peur de la mort. (Temps). Cela doit faire une différence.
Silence.
Jeune femme (douceur).- Un certain jour, un certain soir, je
vous laisserai pour toujours (elle montre la salle). Je fermerai la porte, là (geste), et ce sera fini. Je vous
embrasserai les mains. Je fermerai la porte. Ce sera fini.
Silence. La Jeune Femme le fait, elle
embrasse les mains de madeleine qui se laisse faire. La jeune femme cesse d’embrasser madeleine,
elle la regarde.
Madeleine (effroi).- quelqu’un
viendra chaque soir pour voir… Et pour allumer les lampes… ?
Jeune femme.- Oui. (Temps).
Et un jour il n’y aura plus de lumière. Ce ne sera plus la peine qu’il y ait de
la lumière.
Silence.
Madeleine.- Oui. C’est ça. On écoutera. La respiration aura
cessé.
Silence. Madeleine regarde la Jeune Femme.
Madeleine.- Et toi, où seras-tu ?
Jeune femme.- Partie. Différente pour toujours. Mondaine. Pour
toujours sans vous.
…
Savannah Bay (Extrait)
Une œuvre de Marguerite Duras.
Les éditions de minuit.
jeudi 5 décembre 2013
Il se prit à penser aux anges avec une intensité telle que...
C’est Mira Jama qui a raconté cette histoire. « Un
jeune étudiant en théologie, du nom de Saufe, vivait à Chiraz. Il était brillamment
doué et avait le cœur pur. En lisant et relisant le Coran, il se prit à penser
aux anges avec une intensité telle que son âme vivait en leur compagnie, bien
plus qu’en celle de sa mère, de ses frères de ses camarades d’études ou de tout
autre habitant de Chiraz.
« Il ne cessait de se répéter les paroles du livre
sacré : « … par les anges, qui entrainent les âmes des hommes avec
violence ; par ceux qui attirent les âmes des autres avec douceur ;
par ceux qui planent dans l’air sur l’ordre de Dieu ; par ceux qui précédent
et font pénétrer les justes dans le paradis ; et par ceux qui, soumis à Dieu,
dirigent les affaires de ce monde en subordonnés. »
« Le trône de Dieu, se disait-il est sans doute placé
trop haut pour que l’œil de l’homme puisse l’atteindre, et l’âme humaine
tremble devant lui. Mais les anges radieux se meuvent entre les espaces azurés
de Dieu et nos sombres maisons, nos sombres écoles. Nous devrions être à même
de les voir et d’entrer en contact avec eux. »
« De toutes les créatures, se disait Saufe, les oiseaux
doivent être celles qui ressemblent le plus aux anges. L’Ecriture ne dit-elle
pas : « tout ce qui se meut dans le ciel et sur la terre adore Dieu,
et les anges font de même. »
« Il est certain que les oiseaux se meuvent à la fois
dans le ciel et sur la terre.
« N’est-il pas dit plus loin : « ils ne sont
point gonflés d’orgueil pour dédaigner de servir ; ils chantent ; ils
font ce qui leur est commandé… »
Les oiseaux font de même sans aucun doute. Si nous essayons
d’imiter les oiseaux en tout, nous serons plus semblables aux anges que nous ne
le sommes à présent.
« Mais, en plus de ces choses, les oiseaux sont
pourvus d’ailes. Il serait bon que les hommes fabriquent des ailes à leur
usage, pour les élever jusqu’aux régions ou règne une brillante et éternelle lumière. »
…
« Le plongeur »
(Extrait)
« Le plongeur »
(Extrait)
Une nouvelle extraite de :
« Le dîner de Babette »
(1885-1962)
Traduit du danois
Par Marthe Metzger
dimanche 1 décembre 2013
Prière du soir
Emile Nelligan |
Lorsque tout bruit était muet dans la maison,
Et que mes sœurs dormaient dans des poses lassées
Aux fauteuils anciens d'aïeules trépassées,
Et que rien ne troublait le tacite frisson,
Ma mère descendait à pas doux de sa chambre ;
Et, s'asseyant devant le clavier noir et blanc,
Ses doigts faisaient surgir de l'ivoire tremblant
La musique mêlée aux lunes de septembre.
Moi, j'écoutais, cœur dans la peine et les regrets,
Laissant errer mes yeux vagues sur le Bruxelles,
Ou, dispersant mon rêve en noires étincelles,
Les levant pour scruter l'énigme des portraits.
Et cependant que tout allait en somnolence
Et que montaient les sons mélancoliquement
Au milieu du tic-tac du vieux Saxe allemand,
Seuls bruits intermittents qui coupaient le silence,
La nuit s'appropriait peu à peu les rideaux
Avec des frissons noirs à toutes les croisées,
Par ces soirs, et malgré les bûches embrasées,
Comme nous nous sentions soudain du froid au dos !
L'horloge chuchotant minuit au deuil des lampes,
Mes sœurs se réveillaient pour regagner leur lit,
Yeux mi-clos, chevelure éparse, front pâli,
Sous l'assoupissement qui leur frôlait les tempes ;
Mais au salon empli de lunaires reflets,
Avant de remonter pour le calme nocturne,
C'était comme une attente inerte et taciturne,
Puis, brusque, un cliquetis d'argent de chapelets...
Et pendant que de Liszt les sonates étranges
Lentement achevaient de s'endormir en nous,
La famille faisait la prière à genoux
Sous le lointain écho du clavecin des anges.
Emile NELLIGAN
(1879-1941)
jeudi 28 novembre 2013
samedi 23 novembre 2013
vendredi 22 novembre 2013
Je m’en vais me manger !
Je m’en vais me manger ! Bétïa* ! Viens au moins et
regarde bien, afin que, lorsque je trépasserai de cette vie à l’autre, tu
puisses crier : « jésus ! » Par où est-ce que je dois
commencer à me manger ? Je vais commencer par les pieds, car si je commençais
par les mains, après, je ne pourrai plus m’aider à manger le reste. Bétïa, dis
au moins un « pata-noster » pour
moi ! Allons, adieu : je commence. Il se mord un mollet et se fait mal. Je ne pourrai certainement pas
me manger tout entier. Mais je me mangerai assez pour crever d’indigestion.
La voix de Ruzante :
« Si je pouvais être sur
« Que tu m’aimes de bon cœur… »
« La faridondaine
« la faridondon
« Tirelireli
« tirelirela… »
Angelo Beolco, dit Ruzante
(Né vers 1496 et mort le 17 mars 1542 à Padoue)
Est un écrivain,
dramaturge et acteur italien du XVIe siècle.
Extrait de La Moscheta
Collection « scène ouverte »
Editeur L’Arche
*Bétïa est la femme de Ruzante.
La «langue moscheta» est une expression par laquelle on qualifiait un discours élevé.
*Bétïa est la femme de Ruzante.
La «langue moscheta» est une expression par laquelle on qualifiait un discours élevé.
jeudi 21 novembre 2013
Intermède: À quoi ça sert l'amour
Edith Piaf avec Théo Sarapo
Edith Piaf avec Théo Sarapo
Theophánis Lamboukas est le fils d'un couple d'origine
grecque orthodoxe. Son père, coiffeur, s'établit près de Paris, à La
Frette-sur-Seine (Seine-et-Oise, aujourd'hui Val-d'Oise). Le jeune Theophánis
commence à chanter de bonne heure et participe à dix-huit ans à un concours de
chant. Il fréquente une école de commerce et travaille dans le salon de
coiffure de son père. En 1956, son service militaire l'amène à partir durant 33
mois en Algérie.
Revenu à Paris, il passe ses soirées à
Saint-Germain-des-Prés, où un ami le fait connaître à Édith Piaf, qui le prend
rapidement comme secrétaire. La grande chanteuse, divorcée depuis 1956 de son
premier mari, est séduite par la voix remarquable du jeune homme. Elle l'encourage
à suivre des cours de chant professionnel et lui donne comme nom de scène «
Théo Sarapo », σ’αγαπώ ou s'agapó (« Je t'aime
» en grec) étant le seul mot grec qu'elle connaisse.
Le 9 octobre 1962, à la mairie du 16e arrondissement de
Paris, Théo Sarapo, âgé de 26 ans, épouse Édith Piaf qui a vingt ans de plus et
est alors gravement malade. Le
mariage religieux a
lieu à l'église orthodoxe grecque.
mardi 19 novembre 2013
Joe
Terrain abandonné prés
d’une voie ferrée.
Crépuscule.
Joe entre. Il porte un
pantin rembourré qui fait à peu prés la moitié de sa taille, vêtu d’une veste
aux couleurs vives, d’un pantalon gris sombre, d’une chemise blanche, d’une
cravate rayée et de chaussures marron. Ses vêtements suggèrent un uniforme scolaire.
JOE. Tard. Noir bientôt. Ici c’était les potagers avant.
Pour ça les petites cabanes. Elles s’écroulent. Ils disent quelles sont hantées.
Araignées dedans. Pointe le doigt.
Voie ferrée.
Pleure pas. J’aurais pas du t’amener avec moi aujourd’hui. Je t’ai amené parce que tu pleurais.
Maintenant tu pleurs encore plus. Tu as peur ? Tu
n’aimes pas le noir. Ça ira pour cette nuit. Tu as faim ? Je t’apporterais des bonbons demain matin.
Quels bonbons je dois t’apporter ?
Mon gouter sera froid. Maman me fera la guerre. Elle attend
pour sortir. Si tu pouvais marcher on rentrerait ensemble. Je te lâcherais devant la porte de chez toi.
Resterais dehors dans la rue. Les entendrais dedans t’engueuler d’être en
retard. On en rirait demain matin. Ça c’était ma veste avant. Te l’ai passé quand j’ai trop grandi
pour la mettre. Je mets toujours mes affaires dans les poches. Cachète secrète. Pleurs pas.
- maintenant il va pleurer encore plus. Quels bonbons tu
veux ? Je les achèterai avec l’argent des clopes de maman. Dirai je l’ai
perdu. Elle ne me croira pas. Je m’en fiche.
Pourquoi je te traine partout ? Tu me causes des
ennuis. Pas allé en classe aujourd’hui à cause de toi
Maman ne veut plus de toi dans la maison. Elle t’enverrait à
la vente de charité. « C’est là que tu l’as gagné à la tombola. Ramène-le.
Tires-en un peu d’argent » ou te jetterait à la poubelle quand je suis en
classe. Tu me fixes des yeux. Si tu étais réel on se disputerait. Ça serait
fini ! Je te dirai barre-toi ! Je dois même parler à ta place.
Parfois je m’entends parler et crois que c’est toi. Quelqu’un m’écouterait là
il penserait que je suis fou. Faut qu’on arrête ! Je suis trop vieux pour
toi ! Tu n’es rien ! Un pantin rembourré !
C’est pas ma faute si t’es pas réel. C’est mieux pour toi
comme ça. Pas d’examens. Pas de
commissions « range tout ça. Je ne vais pas nettoyer ta
chambre ! »
Quels bonbons tu veux ? Je ne sais même pas ceux que tu
préfères. Je te donne les miens. Je pensais juste que c’était ceux-là.
Sans lever les yeux. Quand
il commence à faire noir le ciel est sale. Rayé. Oublié de se laver la figure.
...
Extrait de « Les enfants » et « Onze débardeurs »
...
Extrait de « Les enfants » et « Onze débardeurs »
Collection Scène ouverte
Éditeur : L’Arche
jeudi 14 novembre 2013
Le bonheur :
« Si l’on en
croit la plupart des récits, le sage connait la joie suprême en s’absentant du
bonheur lui-même, en préférant au bonheur toujours autre chose, en prétendant
de surcroit que cet au-delà du bonheur est infiniment supérieur à ce que les insensés
que nous sommes persistons, aveuglément, à quémander de l’existence.
Contrairement à ce qu’on
croit généralement, ce goût pour le détachement du bonheur est actif aussi bien
en Occident qu’en Orient. En fait, sous des attitudes au premier abord très différentes,
comme celle d’Epicure et celle de Confucius, que rien ne semble relier, se
discernent les lignes d’un même paradoxe – celui du bonheur par indifférence ».
Roger-Pol Droit : Les Héros de la sagesse aux éditions
Flammarion.
Coût 9€.
lundi 11 novembre 2013
Mes Philippines:
A 25 ans j’endossais l’identité d’assistant photographe pour
un reportage de guerre aux Philippines.
(Comme mentionné sur mon passeport de l'époque).
(Comme mentionné sur mon passeport de l'époque).
Dans le Sud, (non loin de Mindanao la
grande île où était concentrée la minorité musulmane et les
séparatistes musulmans du Front Moro s’opposant depuis les années 1970 au
pouvoir de Manille, très proche de l'Église catholique).
C’est auprès d’eux que nous avions pris rendez-vous.
J’ai vu là en janvier 1976 de jeunes guérilleros de 16 ans poussés par leurs aînés âgés de 30 ou 40 ans. se jeter à l’assaut de militaires.
J’ai vu un journaliste correspondant de la "UNE" (chaîne de télévision française de
l’époque) offrir à l’un des chefs de la guérilla un poignard allemand portant
l’insigne nazi sur son pommeau parce que ce guérillero faisait collection de
poignards.
Quelques jours plus tard, vers midi ou une heure de
l’après-midi, et suite à un assaut commandité par la presse contre des
militaires, et ce, afin de pouvoir revenir en France avec des images…
J’ai vu deux jeunes hommes allongés à terre et dépossédés de
la moitié de leur visage de par l’impact du projectile qui les avait frappés.
Les mouches déjà par centaines se repaissaient de cette
blessure.
D’autres combattants, frères, sœurs ou amis, (une vingtaine) préparaient la niche qui devait protéger leur corps dans la
mort. Les linges blancs des linceuls venaient d'être apportés.
Nous filions en file indienne, nous remontions par un chemin noyé de soleil et sec. C’est le souvenir que j’en ai. Notre étrange travail nous empêchait d’éprouver de quelconques sentiments. Il me restait alors quelques mètres au dessus d’eux l’image de deux visages anonymes et meurtris.
Nous filions en file indienne, nous remontions par un chemin noyé de soleil et sec. C’est le souvenir que j’en ai. Notre étrange travail nous empêchait d’éprouver de quelconques sentiments. Il me restait alors quelques mètres au dessus d’eux l’image de deux visages anonymes et meurtris.
Le lendemain, après une nuit agitée où nous entendions à
intervalles réguliers les explosions de possibles mortiers ; on me dit que les
militaires avaient alors détruits par le feu depuis la mer tout un village et
cela pour un jeu de rôle déloyal. Celui que nous avions créé.
J’avais 25 ans, aujourd’hui j’en ai 56. J’ai si peu parlé de
cela.
En ouvrant ce matin le passeport de ce voyage dont une
grande partie c’est faite (depuis la Malaisie) dans une totale discrétion, clandestinement, avec l’aide de contrebandiers ; je
vois que notre retour des Philippines au port de Sandakan (Malaisie, au nord-ouest de l'île de Bornéo) s’est officiellement
effectué le 3 février 1976.
Je revenais de cette jungle les chevilles quelque peu gangrenées.
Ecrit en 2006.
Je revenais de cette jungle les chevilles quelque peu gangrenées.
Ecrit en 2006.
Rebelle du Front de
libération islamique Moro.
|
vendredi 8 novembre 2013
Martial Caillebotte (1853-1910) "Credo"
Martial Caillebotte: Messe solennelle de Pâques « Credo »
Mathilde Verolles,
soprano ; Patrick Garayt, ténor ; Eric Martin-Bonnet, basse ; Mathias Lecomte,
orgue
Chœur régional
Vittoria d’Ile-de-France
Orchestre Pasdeloup
Michel Piquemal,
direction
1CD aux éditions
Sisyphe020
jeudi 7 novembre 2013
"Les dragons de notre vie" A Franz Xaver Kappus.
Sisyphe par von Stuck
|
Peut-être tous les
dragons de notre vie sont-ils des princesses qui n’attendent que le moment de
nous voir un jour beaux et courageux. Peut-être que toutes les choses qui font
peur sont au fond des choses laissées sans secours qui attendent de nous le
secours. Pensez qu’il se produit quelque chose en vous, que la vie ne vous a
pas oublié, qu’elle vous tient dans sa main ; elle ne vous abandonnera pas.
Pourquoi voulez-vous exclure de votre vie toute inquiétude, toute souffrance,
toute mélancolie alors que vous ignorez leur travail en vous.
Aussi, ne devriez-vous
pas vous effrayer quand se lève devant vous une grande tristesse, comme vous
n’en n’avez jamais vu de tel.
Pourquoi vouloir vous
torturer en vous demandant d’où tout cela peut bien venir et à quoi tout cela
aboutira ?
Vous savez bien que vous
êtes dans des états transitoires et que vous ne désirez rien tant que de vous
transformer. Si certains de vos états sont maladifs, considérez que la maladie
est le moyen qu’a l’organisme pour se libérer de ce qui lui est étranger ; il
faut alors simplement l’aider à être malade, à avoir la maladie dans sa
totalité, à la laisser se déclarer, car c’est par là qu’il progresse…
Vous êtes le médecin qui
doit veiller sur lui même… Et voilà ce qu’il faut faire avant tout pour autant
que vous soyez votre médecin.
Rainer Maria Rilke «
lettres à un jeune poète » 1904
Le livre de poche (environ 5€uros)
Le livre de poche (environ 5€uros)
René Karl
Wilhelm Johann Josef Maria Rilke
Ancien secrétaire du
sculpteur Auguste Rodin était né dans une famille désunie. Une solitude dès
l'enfance.
Plus tard, il se détache
de tout et erre entre l'Italie, la Russie, en Espagne, au Danemark, A Prague,
Munich et Berlin, en France et en Suisse. Dans la solitude.
« Une seule chose
est nécessaire : la solitude. La grande solitude intérieure. Aller en soi-même
et ne rencontrer pendant des heures personne, c'est à cela qu'il faut parvenir.
Etre seul, comme l'enfant est seul. »
samedi 19 octobre 2013
Entre Ecuador y Colombia:
(Alberto est un homme de quatre-vingt ans).
Nous finirons par arriver à bon port, devant sa petite
maison qui ne paie pas d'mine, ressemblant plus à un garage qu'à une
habitation, posée au milieu du hameau de Palestina...
Je lui remets souriant les sacs et les 36 citrons, nos mains
se rejoignent à nouveau pour n'en former qu'une...
Yeux dans les yeux, nos sourires pleins et sincères dessinés
sur nos visages, une émotion vive planant sur nous...
Il me dit et me répète un mot, encore et encore, que je
tarde à comprendre, me montrant le ciel, et me pointant du doigt... ça y est,
je saisi et lui souris... le voilà qui me bénit de ses dieux... pour l'avoir
aidé et accompagné de la sorte... Ah mon bon Alberto... si tu savais… moi c'est
la Vie à qui je souris, de m'avoir offert ta rencontre, ta "lenteur sage",
ton pas sûr et ton "juste souffle"... comme une nouvelle inspiration
que tu m'impulses pour ma suite. Sourire à la vie de nous avoir offert cette
croisée de chemin, où nous avions chacun du beau en cadeau, Alberto.
De Benjamin Dubost
« Twinlaïne » de Benjamin Dubost.
jeudi 17 octobre 2013
Affamé, transi, affolé, indigent on ne choisit pas.
Affamé, on ne choisit pas sa pitance ;
Transi, on ne choisit pas ses habits ;
Affolé, on ne choisit pas sa route ;
Indigent, on ne choisit pas sa femme.
"Au bord de l'eau" Volume 1 traduit du chinois,
présenté et annoté par Jacques Dars
Editions Folio 1142 pages.
mercredi 9 octobre 2013
mardi 8 octobre 2013
Au salon Arletty
« Il n’y a pas fort longtemps que monsieur de Lanty
possède cet hôtel ?
- Si fait. Voici bientôt dix ans que le maréchal de Garigliano
le lui a vendu…
- Ah !
- Ces gens-là doivent avoir une fortune immense ?
- Mais il le faut bien.
- Quelle fête ! Elle est d’un luxe insolent.
- Les croyez vous aussi riche que le sont monsieur de
Nucingen ou monsieur de Gondreville ?
- Mais vous ne savez donc pas ? »
…
Personne ne savait de quel pays venait la famille de Lanty,
ni de quel commerce, de quelle spoliation, de quelle piraterie ou de quel
héritage provenait une fortune estimée à plusieurs millions. Tous les membres
de cette famille parlaient l’italien, le français, l’espagnol, l’anglais et
l’allemand, avec assez de perfection pour faire supposer qu’ils avaient dû
longtemps séjourner parmi ces différents
peuples. Etaient-ce des bohémiens ? Étaient-ce des flibustiers ?
« Quand ce serait le diable ! disaient de jeunes
politiques, ils reçoivent à merveille. »
« Le comte de Lanty eût-il dévalisé quelques Casauba, j’épouserais bien sa fille ! » s’écriait un
philosophe.
Qui n’aurait épousé Marianina, jeune fille de seize ans,
dont la beauté réalisait les fabuleuses conceptions des poètes orientaux ?
Extrait de « Sarrasine »
Extrait de « Sarrasine »
De Balzac
Editions Libretti
Coût 1,50€
vendredi 4 octobre 2013
samedi 31 août 2013
Avant ton anniversaire
Avant ton anniversaire,
J’irai fleurir de visnages
Ta robe pourpre
Et ta tunique moirée
Avant ton anniversaire,
De petits étendards colorés agitent déjà
De petits étendards colorés agitent déjà
Les ailes frémissantes des messagers.
Avant ton anniversaire
Il me faudra rire, rire et pleurer
Réciter de courts mantras tibétains
Avant ton anniversaire
...
...
lundi 26 août 2013
"je parle des instants les plus intenses de nos vies"
« Les images
oniriques ont quelque chose des galets qui sont dans l’eau. Qui brillent sous
l’onde glacée qui file entre les menthes. Leur beauté fait qu’on se penche. On
ne résiste pas à l’envie de s’agenouiller dans l’odeur merveilleuse qui s’élève
des petites feuilles dentelées et duveteuses des menthes qu’on écrase au-dessus
de l’Yonne. On roule la manche plus haut que le coude. On plonge la main dont
la chair se met à frémir de froid.
Les doigts glacés et
blancs cueillent ces pierres au fond de la transparence ; ils les rapportent à
la lumière ; l’eau en dégoutte ; l’air les assombrit ; les yeux se découragent
; je parle des instants les plus intenses de nos vies ; leur attrait se dérobe
; nous ne savons plus ce que ces pierres qui chatoyaient voulaient nous dire ;
on ne sait plus pourquoi, spontanément, on s’était mis à genoux ».
Pascal Quignard. La
barque silencieuse.
Le petit appartement du rez-de-chaussée (nouvellement aménagé).
Mme Hume
« Ne vous inquiétez pas s’il se conduit de façon un peu
bizarre. Il s’emporte souvent, mais ça
ne signifie pas grand-chose. Les dernières semaines ont été pénibles pour lui. L’homme
qui s’occupait de lui pendant trente ans est mort en septembre, (dernier) et il
a de la peine à si faire. »
Mme hume me fit signe
de m’assoir sur le canapé
Un silence
…
Emmett Fogg, disait le vieillard, en crachant les mots avec
mépris. Quelle sorte de nom est-ce là ?
-M. S. Fogg, répliquai-je. M. comme Marco, S. comme Stanley.
- Ca ne vaut pas mieux.
C’est même pire. Comment allez-vous arranger ça, jeune homme ?
- Je ne vais rien arranger du tout. Mon nom et moi avons
vécu beaucoup de choses ensemble, et avec le temps je m’y suis attaché. »
Monsieur Effing ricana, une sorte de rire grognon qui
paraissait écarter le sujet une fois pour toutes. Aussitôt après, il se
redressa dans son fauteuil. La rapidité de transformation de son apparence fut
surprenante. Il ne ressemblait plus à un demi-cadavre comateux perdu dans une rêverie
crépusculaire ; tout en nerfs et en attention, il était devenu une petite
masse effervescente de force ressuscitée.
…
Il se pencha en avant sur son siège, comme pour m’indiquer
que l’entrevue allait commencer pour de bon. Malgré les caches noirs sur ses
yeux, son regard était dirigé droit vers moi. « Répondez-moi, monsieur
Fogg, êtes vous un homme de vision ? »
- je croyais l’être, mais je n’en suis plus tellement
certain.
- quand vous avez un objet devant les yeux, êtes vous
capable de l’identifier ?
- la plupart du temps, oui. Mais dans certains cas c’est
assez difficile.
- par exemple ?
-par exemple, j’ai parfois la peine à distinguer les hommes
des femmes dans la rue. Tant de gens ont maintenant les cheveux longs, un coup
d’œil rapide ne renseigne pas toujours. Surtout si l’on a affaire à un homme féminin ou à une femme
masculine. Les signaux peuvent être
plutôt confus.
-et quand vous êtes en train de me regarder, quels sont les
mots qui vous viennent à l’esprit ?
- je dis que je regarde un homme assis dans un fauteuil
roulant.
-un vieil homme ?
- oui, un vieil homme.
- un très vieil homme ?
- oui, un très vieil homme
…
Moon Palace
De Paul Auster
Le Livre de Poche
6,60 €
Le petit appartement du rez-de-chaussée
- Avez-vous remarqué quelque chose de particulier à mon
propos jeune homme ?
- Les caches sur vos yeux, sans doute. Et le fait que vos
jambes paraissent paralysées.
- Oui, oui, mes infirmités. Elles sautent aux yeux n’est-ce
pas ?
- D’une certaine manière, oui.
- Et qu’avez-vous conclu au sujet des caches ?
- Rien de précis. J’ai d’abord cru que vous étiez aveugle,
mais ce n’est pas nécessairement évident. Si on ne voit pas pourquoi prendre la
peine de se protéger la vue ? Ca n’aurait donc aucun sens, donc, j’envisage d’autres possibilités. Les
caches dissimulent peut-être quelque chose de pire que la cécité. Une
difformité hideuse, par exemple. Ou bien vous venez d’être opéré, et vous devez
les porter pour des raisons médicales. D’autre part, il se pourrait que vous
soyez parfaitement aveugle et que la forte lumière vous irrite les yeux. Ou qu’il
vous plaise de les arborer pour eux-mêmes, parce que vous les trouvez jolis. Il
y a des quantités de réponses possibles à votre question. Pour le moment je ne
dispose pas d’assez d’informations pour dire quelle est la bonne. À vrai dire,
la seule chose dont je suis sûr est que vous portez des caches noirs sur les
yeux. Je peux affirmer qu’ils sont là, mais je ne sais pas pourquoi ils sont
là.
- autrement dit, vous ne considérez rien comme acquis ?
- cela peut-être dangereux. Il arrive souvent que les choses
soient différentes de ce qu’on croit, et on peut s’attirer des ennuis en se
faisant une opinion à la légère.
...
...
Moon Palace
De Paul Auster
Le Livre de Poche
6,60 €
mercredi 24 juillet 2013
Le dormeur du val
C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Arthur RIMBAUD
(1854-1891)
mardi 23 juillet 2013
mercredi 3 juillet 2013
Dédicace
Fol l’épi de blé
la graminée, la fleur bleue
et ces tranches de citrons
posés sur ta poitrine.
Tu t'es bruni à courir dans la prairie
les pieds meurtris par la broussaille
ardent,
vif,
indompté
brusque.
Là dans l'herbe si verte
donne un coup fatal
puisque le rouge
sied si bien
aux herbes endeuillées.
Froid couteau
amulette pour un mort
mélancolie chaude de chaux vives.
la blessure (une nouvelle fois) mortelle
est d’un rouge cerise
comme la segmentation
du fruit
poisseuse aux doigts.
Meurtrissure anoblie
par l’éclat du métal
en un geste amical
à l’ombre ambrée de ton visage
sang et or
celui de tes cheveux.
Je ne savais rien de tes humeurs assassines
ni de tes yeux verts olive
dans l’esquisse bleutée des chênes lièges.
La poussière andalouse est sanguine
et l’accolade trop vive
comme un soleil brisé de milles lunes.
Je me repais de ta force
et du froid glacial qui entame mes veines.
La cannelle de ton sein
à mes lèvres troublées
adoucie ma douleur.
Achève en hôte enfin
ton geste salvateur
et le jasmin demain couronnera
ta pensée
au verdict sombre et froid
d’un juge pour nos peines.
Mais le souvenir est vif
de toi, tout simplement
courant dans la prairie
irrésistible
jusqu’à ton coup porté.
lundi 1 juillet 2013
Des jambes en bas bleu ciel
FRANK WEDEKIND
L’EVEIL DU
PRINTEMPS
Tragédie enfantine
(Écrite de l’automne
1890 à pâques 1891)
Traduit de l’allemand
par François Regnault
Préface
De Jacques Lacan
Intervention de Freud
sur
L’éveil du printemps
A la société
psychologique du mercredi
A Vienne, en 1907
Ainsi un dramaturge aborde en 1891 l’affaire de ce qu’est
pour les garçons de faire L’amour avec les filles, marquant qu’ils n’y
songeraient pas sans l’éveil de leurs rêves.
Remarquable d’être mis en scène comme tel : soit pour s’y
démontrer ne pas être pour tous satisfaisant,
jusqu’à avouer que si ça rate, c’est pour chacun.
Autant dire que c’est du jamais vu.
Jacques Lacan
Le 1° septembre 1974.
Deux enfants :
Les garçons Melchior Gabor et Moritz (Maurice) Stiefel.
Moritz : Les as-tu déjà ressenties
Melchior : Quoi ?
Moritz : Comment tu disais ?
Melchior : Les excitations mâles
Moritz : Heu…
Melchior : Sans contredit !
Moritz : Moi aussi……………….
Melchior : Je connais ça depuis longtemps, oui ! Déjà
bientôt un an.
Moritz : Moi, j’étais comme touché de la foudre.
Melchior : Et tu avais rêvé ?
Moritz : Mais seulement un rêve très court… des jambes en
bas bleu ciel, qui montaient sur le pupitre, pour être exact, j’ai seulement pensé
quelles voulaient l’enjamber. Je les ai vues
très furtivement.
Melchior : Georg zirschnitz, lui, a rêvé de sa mère.
Moritz : Il te l’a raconté ?
Melchior : Dehors, sur le chemin du supplice.
Moritz : Si tu savais par quoi je suis passé depuis cette nuit-là
!
Melchior : Des remords ?
Moritz : Des remords ??... L’angoisse de la mort.
Melchior : Seigneur Dieu…
Moritz : J’ai pensé : je suis incurable. Je croyais souffrir
d’un mal intérieur. Pour finir, je n’ai trouvé quelques repos que le jour ou
j’ai commencé à rédiger mes Mémoires. Oui, oui, cher Melchior, ces trois
dernières semaines, un Gethsémani pour moi.
Melchior : Moi, dans mon cas, je m’y trouvais plus ou moins
préparé. Seulement une légère honte, et puis, ce fut tout ma foi.
Moritz : Et pourtant tu as au moins un an moins que moi.
Melchior : A ta place, je ne m’en inquiéterais pas. D’après
mes expériences, il n’y a pas d’âge fixé pour le premier surgissement de ces
fantômes. Tu connais bien le grand
Lämmermeier, le blond filasse avec le nez en bec d’aigle ? Trois ans de plus
que moi. Jeannot Rilow dit qu’il ne rêve encore que tartes à la crème et gelée
d’abricots.
La pièce de Wedekind est pleine de mérites. Ce n’est pas une grande œuvre d’art, mais elle restera comme un document, qui intéresse l’histoire de la civilisation et des mœurs.
La pièce de Wedekind est pleine de mérites. Ce n’est pas une grande œuvre d’art, mais elle restera comme un document, qui intéresse l’histoire de la civilisation et des mœurs.
Freud
Le 1° février 1907.
FRANK WEDEKIND
L’EVEIL DU PRINTEMPS
NRF
Gallimard
samedi 29 juin 2013
"Paris has got guns and girls"
lundi 24 juin 2013
Au salon Arletty:
…
Là, fourmillaient, s’agitaient et papillonnaient les plus
jolies femmes de Paris, les plus riches, les mieux titrées, éclatantes,
pompeuses, éblouissantes de diamants ! Des fleurs sur la tête, sur le
sein, dans les cheveux, semées sur les robes, ou en guirlandes à leurs pieds.
C’était de légers frémissements de joie, des pas voluptueux
qui faisaient rouler les dentelles, les blondes*, la mousseline autour de leurs
flancs délicats. Quelques regards trop vifs perçaient ça et là, éclipsaient les
lumières, le feu des diamants et animaient encore des cœurs trop ardents.
On surprenait aussi des airs de tête significatifs pour les
amants, et des attitudes négatives pour les maris. Les éclats de voix des
joueurs, à chaque coup imprévu, le retentissement de l’or se mêlaient à la
musique, au murmure des conversations ;
pour achever d’étourdir cette foule enivrée par tout ce que le monde
peut offrir de séductions, une vapeur de parfums et l’ivresse générale
agissaient sur les imaginations affolées.
* Dentelles de soie. Courant d’air.
Extrait de « Sarrasine »
De Balzac
Editions Libretti
Coût 1,50€
vendredi 21 juin 2013
Carmen Linares
La vingt-troisième édition du Festival flamenco de Nîmes a
apporté une nouvelle preuve que le Sud de la France, et Nîmes en particulier,
sont regardés comme des territoires flamencos, non seulement par les Gitans et
les enfants de l’immigration espagnole qui y vivent, mais aussi par les plus
grands artistes andalous qui adorent s’y produire. Ceux-ci se montrent très
sensibles à l’afición qu’ils y sentent. Cette année, la plupart des spectacles
ont proposé différentes synthèses de ce qui fait aujourd’hui l’extraordinaire
richesse de l’arte flamenco.
C’est à la fin du XVIIIème siècle que remonte l’apparition
des premiers cantaores. Dépourvue d’accompagnement musical, leur plainte est
nue, sauvage, c’est un cri déchirant, l’expression d’un trop-plein de
souffrance, écho des siècles de silence et d’oppression. Toute l’esthétique flamenca
est née de ce cri primordial. Aujourd’hui encore, la plupart des cantes
débutent par un « ay » douloureux. Au cours du XIXème siècle, un ensemble va
peu à peu se constituer, qui regroupera différents palos, (« genres » ou «
formes ») définis par un rythme, une harmonie et une humeur spécifiques. Les
plus anciens de ces chants, tonás, martinetes, soleares et siguiriyas,
constituent ce que l’on appelle le cante jondo (« chant profond »).
L’accompagnement à la guitare y est encore rare, souvent réduit à quelques
accords. Mais avec la professionnalisation du flamenco, des groupes se forment
pour proposer des spectacles plus complets, englobant les trois principales
disciplines du flamenco, le chant, la danse et la guitare. Le répertoire
s’étend alors.
Depuis les années 70, il s’est en outre ouvert à toutes les
modernités musicales et chorégraphiques. Pop, jazz, contemporain, oriental,
aucun registre ne lui résiste, sa dynamique propre lui permettant toujours de
rester un et multiple à la fois.
mercredi 19 juin 2013
Ce qui compte ?
Ce qui compte ? voler, voir la terre de très haut,
parler aux cigognes, devenir ouragan ou fouet, flèche, éclair, n’être plus qu’une
action continue, fluide, instantanée,
qui ignore ce que veut dire hésiter, trembler, échouer – et même vouloir.
Roger-Pol Droit : Les Héros de la sagesse aux éditions
Flammarion.
Coût 9€.
lundi 17 juin 2013
mercredi 12 juin 2013
"De nuit je me suis énamouré"
De nuit je me suis
enamouré
Et la lune m'a dupé
La prochaine fois quand je m’enamourerai petite,
Que ce soit de jour en plein soleil.
*
Au bord de la mer
Je dois aller vivre
Pour voir si je vois
venir
Le petit bateau de
pêche.
Et si je le vois sur les flots,
Sur lui tu dois
m’embarquer
Mon amant est jeune marin
Il navigue sur la mer.
*
De sources en
rivières,
Je t’aperçois toujours au lavoir
Ensorceleuse de mes
yeux
Qui navigue sur la
mer
On me dit de
t’attendre encore
Mais moi je ne puis attendre
Ensorceleuse de mes
yeux,
lundi 10 juin 2013
L'autre jardin
Scène 4
Eglé un instant seule,
Azor parait vis-à-vis d’elle
Eglé, continuant et se
tâtant le visage. Je ne me lasse point de moi. (Et puis, apercevant Azor, avec frayeur.) Qu’est-ce que c’est que cela,
une personne comme moi ?... N’approchez point (Azor étendant les bras d’admiration et souriant. Eglé continue.) La
personne rit, on dirait qu’elle m’admire. (Azor
fait un pas.) Attendez… ses regards sont pourtant bien doux… savez-vous
parler ?
Azor. Le plaisir de vous voir ma d’abord ôté la
parole ;
Eglé, gaiement. La
personne m’entend, me répond, et si agréablement !
Azor. Vous me ravissez.
Eglé. Tant mieux.
Azor. Vous m’enchantez.
Eglé. Vous me plaisez aussi.
Azor. Pourquoi donc me défendez-vous d’avancer ?
Eglé. Je ne vous le défends plus de bon cœur.
Azor. Je vais donc approcher.
Eglé. J’en ai bien envie. (Il avance.) Arrêtez un peu… que je suis émue !
Azor. J’obéi, car je suis à vous.
Eglé. Elle obéit ; venez donc tout à fait, afin d’être
à moi de plus près. (Il vient.) Ah !
La voilà, c’est vous, qu’elle est bien faite ! En vérité, vous êtes aussi
belle que moi.
Azor. Je meurs de
joie d’être auprès de vous, je me donne à vous, je ne sais pas ce que je sens,
je ne saurais le dire.
Eglé. Hé ! C’est tout comme moi.
Azor. Je suis heureux, je suis agité.
Eglé. Je soupire.
Azor. J’ai beau être auprès de vous, je ne vous vois pas
encore assez.
Eglé. C’est ma pensée, mais on ne peut pas se voir
davantage, car nous sommes là.
La dispute
Marivaux (1688-1763)
www.librio.net
Coût 2€uros
vendredi 7 juin 2013
mercredi 5 juin 2013
De David Kawan : -Saisons- Chansons un peu tristes - à M.
David Kawan : -Saisons-
Chansons un peu tristes - à M.
Divertimento
Souffle les pavés du canal
Mêle une larme à mon ruisseau
Énumère les heures du bancal
De courants d'air en courants d'eau
Divertimento
Dessine ta main à l'encre noire
Confie ton envie aux impros
Viens dans ma nuit et fais lui voir
Ta frime c'est bien plus que l'ego
Divertimento
Renomme un à un les nuages
Désaxe le ciel au saxo
Effeuille le lit des outrages
Que j'y fasse vriller ton solo
Si seulement nous avions su
Nous défaire de cette évidence
Garder la raison bien en vue
Quand nos corps brûlaient d'inconscience
Si seulement nous n'avions pas
Cru que le désir est sincère
Nous aurions su que cette affaire
N'était que...
Raconte-nous une belle histoire
Fais de la rime sur mon dos
Tes souvenirs d'enfant Mozart
Rejoue-les moi en legato
Divertimento
Pointe de ton pas mon Paris
Accorde une aumône aux moineaux
Ouvre-moi tes sens interdits
Donne ta rue à mon badaud
Divertimento
Incendie-moi et sans le dire
Ton feu de paille à fleur de peau
Peut bien ravager mon empire
Donner ton sang à mes sanglots
Si seulement nous avions fait
Ce que nous disaient les plus sages
Nous aurions compris bien plus tôt qu'il est
Périlleux de croire aux mirages
Si seulement je n'avais plus
Tenté de conjurer le sort
Alors que tu ne faisais que
Céder au...
Encanaille-moi dans le factice
Travestis un dernier tango
Retiens les gestes qui trahissent
Reprends ce qui serait de trop
Divertimento
Vends-moi des toujours à crédit
Laisse passer encore un métro
Pour un baiser comme un répit
Comme un adieu mais sans le mot
Divertimento
Mets donc un point à mon final
Et finalement de là-haut
Regarde-moi dans le banal
Tu pourrais bien me trouver beau
Si seulement je t'oubliais
Comme toi tu le fis aussitôt
Que se perdit notre chemin
Tout en bas de la rue Soufflot
Si seulement j'oubliais tout
Ce qui agite mon cerveau
Pourrais-je moi aussi prendre goût
Pour ce jeu...
Divertimento
Divertimento
Divertimento
Divertimento
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